Alors que vient de fermer le salon Franchise Expo Paris, Charles Méteaut, avocat au barreau de Paris et spécialiste de la franchise dans les métiers de bouche, livre son expertise pour se lancer ou à adhérer à un réseau.
À quel moment est-il le plus opportun de lancer une franchise en boulangerie-pâtisserie ?
Charles Méteaut : La franchise est un business model qui repose sur la réitération d’une méthode commerciale éprouvée. Il n’y a pas de règle quant au nombre de points de vente à avoir avant de se lancer en franchise. C’est souvent plus une question de volonté de développement pour attaquer de nouveaux territoires et un état d’esprit à adopter pour confier son concept et son image de marque à un tiers indépendant, et être prêt à bien l’assister.
Qu’est-ce que cela implique de devenir franchiseur ?
C. M. : Le franchiseur novice peut avoir des réflexes de contrôle extrême, mais il doit avoir à l’esprit que, contrairement à un gérant de boutique succursale, le franchisé n’est pas un salarié, mais est un chef d’entreprise à qui on donne la capacité de faire du bénéfice. Il gère lui-même sa comptabilité et sa fiscalité. Le franchiseur peut cependant mettre en place des visites et animer son réseau car une franchise n’est pas quelque chose qu’on improvise.
Comment bien choisir son franchisé boulanger, pâtissier ou chocolatier ?
C. M. : Cela repose en partie sur la relation humaine. Le franchiseur a donc tout intérêt à établir les critères qu’il veut voir chez son franchisé : est-ce qu’il est aligné sur ses valeurs, comment travaille-t-il, quelle est son expérience, etc. ? Certains franchiseurs ne veulent pas travailler avec des gens du métier par exemple afin d’être moins challengé sur les recettes. Il est donc essentiel de bien discuter en amont.
Quel est le bon moment pour devenir franchisé ?
C. M. : On peut être tenté d’entrer en franchise, que l’on ait acquis une expérience entrepreneuriale ou non. En tout cas il faut être à l’aise avec l’idée de changer de business model et d’appliquer les normes du réseau qui vont être données par le franchiseur. En contrepartie, un des avantages est d’avoir un modèle clé-en-main pour être boulanger-pâtissier sans avoir à gérer les aspects marketing et communication, en veillant cependant à la rentabilité et à l’équilibre de sa gestion.
Quelles sont les bonnes pratiques à mettre en place pour un candidat à la franchise ?
C. M. : La réglementation française protège le candidat franchisé en termes d’informations, il faut donc bien lire ce qu’il y a dans la documentation que le franchiseur doit fournir : le projet de contrat de franchise ; les bilans des deux dernières années ; l’état du réseau depuis cinq ans constitué notamment par un rappel historique de l’entreprise, le nombre de membres franchisés avec leurs coordonnées mais aussi les autres types de boutiques succursales ou les éventuelles licences de marque existantes ; combien sont entrés et sortis du réseau dans l’année précédente, ainsi que l’état général et local du marché dans le secteur. Lorsqu’un franchisé prospecte, je lui conseille ainsi d’aller voir les autres franchisés du réseau qu’il vise pour vérifier si ce dernier est solide et dépasser la posture promotionnelle du franchiseur.
Juridiquement, quelles sont les règles à connaître ?
C. M. : Il faut savoir que l’entrepreneur franchisé ne peut pas accomplir un projet qu’il pourrait vouloir faire au titre de son indépendance comme par exemple céder son fonds de commerce, faire entrer de nouveaux actionnaires, céder son droit au bail, etc. sans l’autorisation du franchiseur. Par ailleurs, il n’y a pas de règle sur la durée d’adhésion à un réseau, qui est généralement de 7 ans. Par contre, à la sortie du réseau le contrat de franchise prévoit souvent une clause de non-concurrence. Concrètement, le franchisé peut se retrouver pendant un an dans l’interdiction de pouvoir exploiter une autre marque dans ses murs notamment si celle-ci relève de la même activité que la précédente franchise à laquelle il adhérait.
Quelle est la règle en matière de redevance pour pouvoir intégrer un réseau ?
C. M. : Souvent, il existe des droits d’entrée qui dans le secteur de la boulangerie peuvent aller de 5 000 à 30 000 euros en moyenne, parfois jusqu’à 500 000 euros, cela dépend des concepts et des pays. S’ils sont trop bas, ce n’est pas un bon signe et cela peut indiquer que le franchiseur n’est pas forcément convaincu par la rentabilité de son concept. La redevance s’exprime en pourcentage sur le chiffre d’affaires, de 4 à 7% généralement même s’il n’y a aucune règle en la matière.
Propos recueillis par Anaïs Digonnet